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Le mariage ne peut se résumer à une simple « Fatha »!

Aujourd’hui en France, pour sceller leur union, beaucoup de musulmans se contentent d’une simple lecture de la Fatiha en présence d’un imam et de deux témoins, au lieu d’établir un acte de mariage officiel à la mairie. Ce phénomène prend des proportions inquiétantes au vu des préjudices qu’il engendre, souvent alarmants, voire dramatiques.

On désigne par la « Fatha »[1] un mariage officieux qui se déroule oralement. Par le passé, cette pratique, était répandue dans les pays du Maghreb, étant donné l’éloignement de l’administration civile. Les gens se contentaient d’une parole donnée pour sceller ou déclarer un mariage. La dimension de l’honneur et de la parole donnée était engagée. C’est pourquoi, beaucoup de familles musulmanes concluaient le mariage par la simple lecture de la « Fatha ». C’était un contrat moral très respecté, un cadre protecteur, engageant toute une famille, toute une tribu. Mais qui, au demeurant, ne  respecte pas les consignes du « fiqh », droit musulman. Aujourd’hui, la « Fatha » ou ce qu’on appelle communément « le hlal » s’est banalisé.

La religion musulmane considère les relations entre femmes et hommes, désirant fonder un foyer, comme étant des plus nobles. Toute personne prétendant au mariage doit se soumettre aux conditions édictées par le droit musulman qui sont, entre autres, la demande (al khotba) et l’acceptation, la dot, les témoins et l’officialisation de l’union par les services de l’état civil. En l’absence de ces éléments, la relation est considérée comme nulle et non avenue ; et il n’y a pas lieu de parler de « halal ».

Le mariage en islam, est une alliance  bénie, respectueuse, un lien fort entre un homme et une femme, où il s’agit de partager, de donner, de se donner mais aussi de recevoir. C’est un projet de vie où chacun doit déployer les efforts nécessaires pour répandre l’amour, l’harmonie et l’affection. Dieu qualifie le mariage dans le Coran de « Mithaq Ralidh »[2], ce qui signifie : un pacte solennel, une alliance forte et précise dans ce cadre qu’il doit être consigné par écrit.

Chacun sait, que la « Fatha » n’est pas un mariage et peut aboutir à la rupture pure et simple, laissant femmes et enfants à leur triste sort, sans qu’ils ne puissent valoir leurs droits en l’absence d’un document officiel prouvant la relation conjugale. La « Fatha » est un moyen pour se désengager facilement et, par conséquent, de se délier des obligations financières et morales qu’engendre le mariage. Il faut noter également, que l’imam qui scelle un mariage par une simple Fatiha, n’a ni les moyens ni les attributions légales pour veiller à sa pérennité et pour garantir les droits de chacun des époux.

Le Cheikh Salman Ibn Fahd Al-Oadah affirme que : « La lecture de la Fatiha n’est pas un contrat de mariage et ne constitue pas un substitut à l’acte de mariage, mais c’est une annonce de l’intention de faire l’acte de mariage dans le futur. Elle ressemble aux fiançailles, et plus exactement, elle est considérée être les fiançailles dans certains pays, et il ne résulte de la lecture de la Fatiha aucun engagement »[3].

Le Conseil Européen de la Fatwa et de la Recherche a souligné, lors de sa quinzième session, l’importance et la nécessité, pour les musulmans d’occident, de notifier les contrats de mariage auprès des autorités civiles compétentes afin de garantir les droits des deux époux, les droits de paternité, et d’éviter le risque de désaveu du lien matrimonial par l’un des deux époux.

Dieu a ordonné explicitement, dans le Coran,  l’engagement par écrit lorsqu’il s’agit de dettes : « Ô les croyants ! Quand vous contractez une dette à échéance déterminée, mettez-la en écrit ; et qu’un scribe l’écrive, entre vous, en toute justice ; […] Ne vous lassez pas d’écrire la dette, ainsi que son terme, qu’elle soit petite ou grande : c’est plus équitable auprès de Dieu, et plus droit pour le témoignage, et plus susceptible d’écarter les doutes »[4]. Il s’agit d’un commandement divin concernant le commerce et les dettes, car les écrits préservent les droits. À plus forte raison, nous devons recourir aux écrits officiels lorsqu’il s’agit d’une alliance entre deux êtres pour préserver l’honneur et les liens familiaux. « Ô vous avez cru ! Honorez fidèlement vos engagements et vos contrats »[5].

Il est unanimement connu que la rédaction et l’enregistrement des contrats auprès des autorités en place, de quelque type qu’ils soient, sont ordonnés par le droit musulman.

Depuis plusieurs années, on sensibilise les musulmans et les imams en France, de ne célébrer la cérémonie de la Fatiha qu’après avoir vérifié, au préalable, l’officialisation de l’union par un acte de mariage établi par les services de la mairie. Mais, malheureusement,  il y a encore des personnes qui ne respectent pas cette disposition, et par conséquent, le phénomène persiste et prend une ampleur considérable. Etre intimement fidele à sa foi, c’est consigner son mariage par un écrit officiel et  ainsi assumer ses responsabilités afin d’honorer ses engagements.

Il est temps de dénoncer le mariage officieux, scellé par la simple lecture de la Fatiha, car il trahit l’essence même du message de l’islam. Beaucoup de musulmans amalgament souvent les pratiques culturelles avec les principes islamiques et pensent, à tort, que la « Fatha » est le vrai  mariage islamique. C’est au nom de notre spiritualité que nous devons dénoncer le mariage officieux, scellé par la simple lecture de la Fatiha. Nous devons également sensibiliser et interpeller la conscience de la communauté musulmane afin de mettre un terme à cette pratique qui trahit les principes de  l’islam.


[1] « Fatha » signifie lecture de la « Fatiha » la première sourate du Coran.

[2] Sourate 4, verset 21.

[4] Sourate 2, verset 286.

[5] Sourate 5, verset 1.